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Mes saisons d'éducateur

Des émotions, des rencontres, de belles histoires

Des larmes pour une grande leçon

Des larmes pour une grande leçon

Un premier article doit donner le ton du blog, il doit permettre de savoir où on met les pieds. C'est la raison pour laquelle, je vais commencer par une première anecdote qui m'a marqué et permis de comprendre que le football doit être avant tout un jeu et un plaisir chez les enfants. Là, nul esprit de compétition, nulle volonté de gagner à tout prix. Il y a des choses qui ne se font pas. Et ce jour-là, je l'ai pourtant fait.

Nous sommes à Alès en 1994 je crois, en tournoi avec les Poussins du Stade Laurentin (en gros, les U10/U11 d'aujourd'hui). C'est un tournoi typique de fin d'année, convivial et presque champêtre. Nous sommes partis à trois équipes si ma mémoire est bonne et tout se passe à merveille même si j'ai dû passer l'une des trois nuits dehors à me réchauffer entre deux poubelles. En effet, j'avais voulu aller me changer pour sortir avec le reste de la délégation mais croyant que je ne voulais pas sortir, les autres étaient partis en bus sans moi et je m'étais retrouvé enfermé à l'extérieur, sans possibilité de rentrer me coucher. Sauf qu'au petit matin je me suis rendu compte que la porte était bien ouverte et que je m'étais donc frigorifié pour rien. Soirée pourrie donc, mais qui avait eu le mérite de faire rire tout le monde... Même moi.

Mais ce n'est pas le propos de l'article.

Dernier jour du tournoi, nous sommes en finale.

Le score n'évolue pas, le match est assez serré et j'ai à côté de moi un dernier remplaçant, toujours pas entré en jeu. J'hésite. Et finalement, je tranche : je ne le ferai pas entrer.

Et alors ? C'est normal, non ? c'est une finale. On joue pour gagner. Je ne vais pas faire n'importe quoi pour faire entrer un joueur au risque de déstabiliser mon équipe.

J'ai 21 ans et j'ai tort. Ce n'est évidemment pas normal. Et puis, déstabiliser une équipe de gamins de 10 ans, franchement... Je me prenais pour un entraîneur que je n'étais pas et je ne me suis même pas comporté comme un éducateur.

Fin du match. Tirs aux buts. Défaite.

Et là, je vois mon petit blondinet (qui se reconnaîtra peut-être), ce petit gamin de 10 ans en larmes. Lui, ce qu'il voulait, c'était participer à la fête. Jouer, taper dans le ballon, s'amuser avec ses copains. Et moi, je l'ai privé de tout ça. Imbécile que j'étais !

Ce jour-là, peut-être un peu tardivement je l'admets, j'ai compris une chose essentielle : on se fout du résultat dans les petites catégories ! Seuls comptent l'apprentissage, le plaisir et la transmission de certaines valeurs. Victoire ou défaite, peu importe. Ou plus précisément, on ne doit jamais rechercher la victoire à tout prix. Et surtout pas au prix des larmes d'un enfant.

Cette histoire a radicalement changé mon point de vue sur ces questions. Et à chaque fois que je me suis retrouvé dans un rôle d'entraîneur général, à Saint-Laurent ou à Mougins, j'ai essayé de faire passer ce message du mieux possible. J'espère y être parvenu quelques fois.

Effet induit de cette expérience, quelques années plus tard, j'entraîne les 15 ans du Stade Laurentin et nous recevons l'OGC Nice en demi-finale de la Coupe Côte d'Azur. Le Gym évolue en Ligue, nous, en Excellence, une division en-dessous. Je me souviens que c'était un samedi soir, il y avait un peu de monde au stade, l'ambiance était belle.

Et nous réalisons un très bon match. Nous tenons le Gym en échec. A 20 minutes de la fin, nous avons même la possibilité de prendre l'avantage mais le face à face entre notre avant-centre et le gardien niçois tourne à l'avantage de ce dernier.

Et puis, il reste un remplaçant sur le banc. Toujours pas entré en jeu. Habituel titulaire, il se retrouve ce jour-là remplaçant car il avait été malade durant la semaine et n'avait pas pu s'entraîner.

Me revient en mémoire cette finale de tournoi à Alès. Je le fais donc entrer en jeu pour ne pas qu'il vive cette demi-finale sur le banc et pour qu'il participe lui aussi à ce beau moment.

Mais, comme un imbécile, je le fais entrer à son poste, latéral droit, alors que notre défense n'est absolument pas en danger. En tout cas, elle tient la route.

Trois minutes après son entrée, premier but niçois après un débordement sur son côté.

Dix minutes après, second but niçois, toujours du même côté.

Nous n'avons pas perdu cette demi-finale à cause de ce joueur (qui se reconnaîtra aussi peut-être) mais bien à cause de moi : que j'effectue ce changement à 15 minutes de la fin, pourquoi pas ? Mais en aucun cas je n'aurais dû le faire entrer à son poste de latéral droit.

Et voilà comment quelques larmes en 1994 nous ont peut-être fait perdre une demi-finale de Coupe Côte d'Azur en 1999 (je ne suis plus très sûr de la date, il faudrait que je vérifie dans mes carnets) sans pour autant que cela soit dramatique. 

D'erreurs d'appréciation en erreurs de coaching, j'ai appris beaucoup. Je crois avoir pris le temps d'apprendre parce que j'aime apprendre et j'aime comprendre. Cela passe par des échecs. Heureusement, j'ai pu m'en servir pour connaître aussi quelques succès.

Comme vous le voyez, je n'ai pas créé ce blog pour me donner le beau rôle. Je l'ai créé pour me souvenir, comme on se raconte des histoires entre amis, pour passer un bon moment, parfois un peu nostalgique, parfois pour rire et pour rire de soi aussi. Mais parfois, j'aurai peut-être aussi le beau rôle... Je ne m'interdis rien :)

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